ATELIER DU CEPAS SUR LE PROCESSUS ELECTORAL EN RDC

Publié le par CEPAS - AD

Soutenir le dialogue entre les organisations de la société                        civile sur le processus électoral

 

 

JOURS 2 & 3 : 50 participants/jour

 

« Soutenir le dialogue entre les organisations de la société civile pour harmoniser l'opinion sur la tenue des élections avec ou sans période de transition en RDC », tel est le thème de l’atelier de trois jours que le CEPAS a organisé du lundi 14 au mercredi 16 mai 2018, dans les salles jumelées Henri de Decker et Léon de Saint Moulin du CEPAS.

 

Le deuxième jour : approfondissement des thèses dans les groupes…

            Le deuxième jour de l’atelier sur le processus électoral en RD Congo était consacré à l’examen approfondi des deux thèses dégagées lors des discussions du premier jour, en deux groupes de travail différents : élections le 23 décembre 2018, comment y arriver ? (thèse 1) ; élections après une période de transition, quelles conséquences ? (thèse 2)

 

Thèse 1 : élections le 23 décembre 2018, comment y arriver ?

            Les membres de ce premier groupe de réflexion ont eu pour mission d’examiner en profondeur le scénario du respect du calendrier électoral actuel qui prévoit les élections législatives et présidentielle en décembre prochain. 7 volets d’analyse ont guidé la réflexion :

  1.         Est-il possible, compte tenu de la situation actuelle, que les élections aient lieu en décembre 2018 ?
  2.         Si oui, quels sont les jalons à parcourir d’ici à décembre 2018 et qui sont les acteurs impliqués ?
  3.         A quel moment doit-on commencer à sonner la sonnette d’alarme pour ne pas être mis devant un fait accompli vers décembre prochain ?
  4.        Une révision constitutionnelle est-elle possible ou prévisible pendant ce temps ?  Sur quoi porterait une telle révision? Quelles en seraient les conséquences sur l’apaisement ou l’aggravation de la crise institutionnelle de légitimité dans laquelle la RDC est plongée? Quelles seraient ses chances de réussite (ou risques d’échec) ?
  5.         Que penser de la machine à voter ? Quelles sont les conséquences (techniques, logistiques, économiques, légales, etc.) possibles de son utilisation ? Faut-il l’utiliser ou non ?
  6.          Si la CENI n’organisait pas les élections le 23 décembre 2018 ? Qui sera responsable ? Quelle sera la sanction ? Qui va l’appliquer ? Le CNSA ? Le SADC ? L’UA ? L’ONU ? Contre quelle institution ? Selon quelles prérogatives ?
  7. Quelle incidence aurait l’enrôlement ou non des Congolais de l’étranger sur le processus électoral en cours ?

            La question fondamentale à examiner était donc évidente : les élections sont-elles possibles en décembre 2018 ? Oui, ont répondu les partisans de la première thèse, avec des conditions préalables à remplir pour arriver à bon port, notamment : paix, stabilité, confiance entre les parties prenantes, disponibilité des ressources financières, décrispation politique, libertés publiques, indépendance de la CENI, accord sur l’utilisation ou non de la « machine à voter », etc.

            Cependant, les tenants de cette thèse estiment qu’il ne faut pas être dupe. Au vu de la situation politique actuelle, il y a fort à parier que les élections ne soient pas possibles à la date prévue par la CENI (23 décembre 2018), si la volonté politique de la part de toutes les parties prenantes n’y est pas. Dans une telle éventualité, il faudrait que la société civile appuie sur la sonnette d’alarme suffisamment à temps (au plus tard en juillet prochain), pour ne plus être pris au dépourvu à l’approche de la date butoir.

 

Thèse 2 : élections après une période de transition : quelles conséquences ?

  1.    Est-il possible/pertinent d’organiser une transition sans le président Kabila ?
  2.         Quels seraient la durée et la mission de cette transition ?
  3.         Qui peuvent être animateurs de cette transition ? Comment seront-ils désignés ? Sur base de quels critères et comment obtenir un relatif consensus à ce propos ?
  4.        Par quel mécanisme décidera-t-on d’une telle transition ?
  5.         Et qui le ferait ? La CENCO ? L’Union Africaine et l’ONU (selon l’Accord Cadre pour la Paix, la Sécurité et la Coopération entre la RDC et les pays de la région d’Addis-Abeba) ? La rue, tel que cela est préconisé par les mouvements citoyens et certains partis politiques d’opposition ? Quel en est le résultat à ce jour et son apport au processus électoral ?
  6.          Quels sont ses risques sur le processus électoral ?
  7.         Et si la démarche de la rue ou d’autres mécanismes (nationaux ou régionaux) visait ou aboutissait à créer un vide au sommet de l’Etat, qui le comblerait et comment le ferait-il ?
  8.        Quel sort les tenants de cette thèse voudraient réserver aux institutions de la République (Présidence, Parlement, Gouvernement) et les conséquences de cette option sur la sécurité du pays ?
  9.           Quelle serait l’adhésion (acteurs de tous bords et population) à une telle démarche (pour ne pas être qualifiée de non inclusive) ?
  10.           Quelles seraient les conséquences possibles d’une telle transition sur la consolidation de la démocratie — et notamment du point de vue de l’alternance politique au sommet de l’état ?

            Les tenants de cette thèse sont partis d’un double constat devenu obvie : d’une part, la Majorité au pouvoir semble briller par un certain manque de volonté politique d’accélérer le processus électoral, multipliant subterfuges et alibis pour s’éterniser indûment au pouvoir. D’autre part, l’Accord de la St Sylvestre 2016 ne reposait pas sur une réconciliation nationale sincère ni sur une volonté de changement partagée par toutes les parties prenantes au dialogue facilité par la CENCO. Au contraire, les agendas mesquins ont prévalu sur l’intérêt supérieur de la nation, torpillant le dialogue de l’amont à l’aval…Ce double constat est ainsi à la base du déficit de confiance qui mine le processus électoral en cours : tous les acteurs se regardent en chiens de faïence, se soupçonnant mutuellement.

            Il faut donc une transition, dirigée par des acteurs de la société civile, qui aurait pour mission d’asseoir la réconciliation nationale et de préparer des élections crédibles et démocratiques. Il va de soi, ont-ils fait remarquer, que ladite transition devrait mettre hors-jeu les institutions actuelles responsables du retard électoral et de la morosité de la situation sociopolitique actuelle : Présidence de la République, Parlement, Gouvernement

            Naturellement, une telle démarche, comme l’a constaté le groupe, si elle n’est pas bien mûrie et menée avec prudence et sagesse, contient des risques non négligeables, notamment : insécurité, instabilité, inconstitutionnalité, guerre civile éventuelle, balkanisation du pays, crise humanitaire et sociale, etc. Que faire alors ? Il faudrait approfondir davantage cette question pour mettre en place une démarche qui rencontrerait une large adhésion du peuple et qui troublerait moins la paix sociale qui, ont reconnu les tenants de la thèse, n’est pas déjà rose. Des suggestions ont été émises sur le format d’une telle transition (animateurs, durée, mandat).

            Enfin, il convient de noter que les animateurs de ladite transition ne seraient pas candidats aux élections qu’ils auront été chargés de préparer.

 

Troisième jour de l’atelier : mise en commun et possible conciliation des deux thèses…

             Peut-on concilier les deux thèses apparemment contradictoires ? Telle a été la tâche du dernier jour de l’atelier, après avoir écouté les arguments de chaque thèse.

            La plénière a constaté que dans le fond, les tenants des deux thèses veulent tous la même chose : des élections crédibles, dans un climat apaisé. En effet, c’est l’intérêt supérieur de la nation qui devrait primer sur les ambitions personnelles et souvent égoïstes des acteurs politiques.

            Après un temps de débat où chaque thèse a été à nouveau analysée par la plénière, une voie médiane s’est dégagée : la tenue  d’élections libres, démocratiques et transparentes le 23 décembre prochain devrait constituer la priorité de la société civile dans son ensemble.

            Cependant, tirant profit des leçons de l’histoire récente du pays, la société civile doit rester en état d’alerte permanent et devenir « proactive » plutôt que « réactive » comme les deux dernières années.

            En clair, il s’agit d’exercer une pression permanente sur les institutions chargées d’organiser les élections pour que celles-ci se tiennent à la date prévue par le calendrier électoral. Dans ce sens, des obstacles qui se dressent encore sur le chemin du processus électoral devront être rapidement examinés.

            Néanmoins, si la société civile se rend compte que les élections deviennent hypothétiques (puisque les jalons n’auront pas été respectés, par exemple) et qu’on se dirige vers un énième report, elle devrait immédiatement tirer la sonnette d’alarme et initier une série de plaidoyers pour que les animateurs politiques actuels soient tenus pour responsables de ce énième échec électoral.

            Pour le dire autrement, d’après les représentants de la société civile qui ont pris part à l’atelier du CEPAS sur le processus électoral en cours, la tenue d’élections libres, démocratiques et transparentes le 23 décembre prochain demeure une priorité à défendre. Les jalons qui y conduisent doivent être constamment et scrupuleusement examinés afin d’éviter toute surprise de mauvais goût. Au cas où l’on se dirigerait vers un énième report, la société civile a le devoir de déclencher un plaidoyer auprès des partenaires nationaux et internationaux pour proposer un schéma de sortie de crise idoine, qui tienne compte de la responsabilité de l’échec du processus à établir.

            Pour terminer, le CEPAS, organisateur de l’atelier de réflexion, a annoncé que les résultats seront partagés avec les acteurs politiques et d’autres structures de la société civile pour que soit maintenu le dialogue entre différents acteurs impliqués dans le processus électoral en cours. La RD Congo est un patrimoine commun à tous les Congolais, le rappelle toujours Le Potentiel (Quotidien congolais) ; il appartient donc à tous de lutter et d’en faire un espace où il fait bon vivre pour tous ses fils et filles.

 

 

 

Alain NZADI-a-NZADI, sj

Directeur du CEPAS et Rédacteur en Chef de la revue Congo-Afrique

CEPAS: Groupes de travail et plénière de l'atelier sur le processus électoral en RDC
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